Napoléon le petit

15 janvier 2009

 

 

Que peut-il ? Tout. Qu'a-t-il fait ? Rien.
 Avec cette pleine puissance,
 en huit mois un homme de génie eût changé la face de la France,
de l'Europe peut-être. 
Seulement voilà, il a pris la France et n'en sait rien faire.

Dieu sait pourtant que le Président se démène :
 il fait rage, il touche à tout, il court après les projets ;

ne pouvant créer, il décrète ; il cherche à donner le change sur sa nullité ;
c'est le mouvement perpétuel ; mais, hélas ! cette roue tourne à vide.
 
L'homme qui, après sa prise du pouvoir a épousé une princesse étrangère,
 est un carriériste avantageux.
 Il aime la gloriole, les paillettes, les grands mots, ce qui sonne, ce qui
brille, toutes les verroteries du pouvoir. Il a pour lui l'argent,
 l'agio, la banque, la Bourse, le coffre-fort.


Il a des caprices, il faut qu'il les satisfasse.
Quand on mesure l'homme et qu'on le trouve si petit
 et qu'ensuite on mesure le succès et qu'on le trouve énorme,

il est impossible que l'esprit n'éprouve pas quelque surprise.

 On y ajoutera le cynisme car, la France, il la foule aux pieds,

lui rit au nez, la brave, la nie, l'insulte et la bafoue !
Triste spectacle que celui du galop, à travers l'absurde,
d'un homme médiocre échappé ".

 
Victor HUGO, Napoléon, le petit
Réédité chez Actes Sud

 

 

 

 

Victor Hugo a publié en 1852 à Bruxelles un pamphlet contre Napoléon III, qu'il a intitulé " Napoléon le petit ".
Dans son texte une interview fictive
:

( signalé par Gérard Chenu. Réédité chez Actes Sud )

 

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Dessin de Daumier

 

 

ENTRETIEN AVEC VICTOR HUGO


Vous semblez vous tenir très informé de l’actualité politique française. Quel regard portez-vous sur notre nouveau président ?


Victor Hugo : Depuis des mois, il s’étale ; il a harangué, triomphé, présidé des banquets, donné des bals, dansé, régné, paradé et fait la roue… Il a réussi. Il en résulte que les apothéoses ne lui manquent pas. Des panégyristes, il en a plus que Trajan. Une chose me frappe pourtant, c’est que dans toutes les qualités qu’on lui reconnaît, dans tous les éloges qu’on lui adresse, il n’y a pas un mot qui sorte de ceci : habilité, sang-froid, audace, adresse, affaire admirablement préparée et conduite, instant bien choisi, secret bien gardé, mesures bien prises. Fausses clés bien faites. Tout est là… Il ne reste pas un moment tranquille ; il sent autour de lui avec effroi la solitude et les ténèbres ; ceux qui ont peur la nuit chantent, lui il remue. Il fait rage, il touche à tout, il court après les projets ; ne pouvant créer, il décrète.

Derrière cette folle ambition personnelle décelez-vous une vision politique de la France, telle qu’on est en droit de l’attendre d’un élu à la magistrature suprême ?

Victor Hugo : Non, cet homme ne raisonne pas ; il a des besoins, il a des caprices, il faut qu’il les satisfasse. Ce sont des envies de dictateur. La toute-puissance serait fade si on ne l’assaisonnait de cette façon. Quand on mesure l’homme et qu’on le trouve si petit, et qu’ensuite on mesure le succès et qu’on le trouve si énorme, il est impossible que l’esprit n’éprouve quelque surprise. On se demande : comment a-t-il fait ? On décompose l’aventure et l’aventurier… On ne trouve au fond de l’homme et de son procédé que deux choses : la ruse et l’argent…Faites des affaires, gobergez-vous, prenez du ventre ; il n’est plus question d’être un grand peuple, d’être un puissant peuple, d’être une nation libre, d’être un foyer lumineux ; la France n’y voit plus clair. Voilà un succès.

Que penser de cette fascination pour les hommes d’affaires, ses proches ? Cette volonté de mener le pays comme on mène une grande entreprise ?

Victor Hugo : Il a pour lui désormais l’argent, l’agio, la banque, la bourse, le comptoir, le coffre-fort et tous les hommes qui passent si facilement d’un bord à l’autre quand il n’y a à enjamber que la honte…Quelle misère que cette joie des intérêts et des cupidités… Ma foi, vivons, faisons des affaires, tripotons dans les actions de zinc ou de chemin de fer, gagnons de l’argent ; c’est ignoble, mais c’est excellent ; un scrupule en moins, un louis de plus ; vendons toute notre âme à ce taux ! On court, on se rue, on fait antichambre, on boit toute honte…une foule de dévouements intrépides assiègent l’Elysée et se groupent autour de l’homme… C’est un peu un brigand et beaucoup un coquin. On sent toujours en lui le pauvre prince d’industrie.

Et la liberté de la presse dans tout çà ?

Victor Hugo (pouffant de rire): Et la liberté de la presse ! Qu’en dire ? N’est-il pas dérisoire seulement de prononcer ce mot ? Cette presse libre, honneur de l’esprit français, clarté de tous les points à la fois sur toutes les questions, éveil perpétuel de la nation, où est-elle ?
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*Toutes les réponses de Victor Hugo proviennent de son ouvrage « Napoléon le Petit », le pamphlet républicain contre Napoléon III.

 

Toute ressemblance avec des personnages imaginaires serait purement fortuite

 

Une conférence intéressante et bien documentée de Pierre Hillard, économiste, sur la mondialisation ( décembre 2008 ) .

Pour savoir l'essentiel sur ce processus, en cours, en 50 minutes

 

pierre_hillard

Pierre Hillard

 

Dans sa conférence de 50 minutes on découvre tous les rouages, bien réels, qui sont à l'oeuvre pour donner naissance, à l'horizon 2015 à une " gouvernance mondiale " . Il ne s'agit pas de "conspirationnisme politique". Son exposé, clair et précis, est émaillé de citations impressionnantes, référencées, issues de la bouche de nombre d'hommes politiques connus, que ces citations datent de plusieurs années ou soient contemporaines. De Villepin a exprimé récemment son souhait de voir émerger rapidement une " gouvernance mondiale ". Une analyse aussi pertinente qu'inquiétante.

 

le livre de Hillard

 

Son livre, publié aux éditions François Xavier de Guibert

 


 

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